La terre nous est étroite de Mahmoud Darwich



 (1966-1999)Préface inédite et choix de l'auteurTrad. de l'arabe (Palestine) par Elias SanbarCollection Poésie/Gallimard (n° 343), GallimardParution : 03-03-2000

Né en 1941 à Birwa, près de Saint-Jean-d'Acre, aujourd’hui le nord d’Israël mais qui  devait faire partie de l’état arabe.. Mahmoud Darwich est considéré comme l'un des plus grands poètes arabes contemporains. 

Ce volume est sa première anthologie personnelle, avec de nombreux textes inédits, et comme il le définit lui-même, une anthologie " qui permet de garder la source lumineuse de l'oeuvre en laissant de coté ses parts d'ombre, isoler un poème ou un autre, insister sur des images, des métaphores, une atmosphère qui conforte une certaine approche et, en terme de ces démarches subjectives, faire d'un poète moyen un poète exceptionnel... "

Un tel parcours, dans une œuvre qui prolonge les mythes du Proche Orient ancien mais aussi les grandes odes de l'Arabie, révèle un poète d'exception qui sait spontanément se situer au croisement de l'expérience individuelle la plus intime et de la mémoire collective. Lorsque Mahmoud Darwich écrit, il laisse dans un premier temps son inspiration inconsciente l'entraîner. Il les écrit, les oublie pendant une longue période puis revient leur rendre visite. Il choisit ensuite de ne pas l'abandonner si le poème le dépasse comme si le poème était l'oeuvre d'un autre poète qui a entraîné celui qu'il était. Sa quête est celle de la longue marche d'un poème qu'il n'a pas encore écrit...Mahmoud Darwich est très sensible aux changements de temps, aux cadences du paysage poétique universel, l'identité de l'homme depuis le passé de son exil jusqu'à son présent exilé...


« J’avais six ans. Je me souviens surtout de notre fuite, nous nous sommes d’abord abrités sous les oliviers, puis nous avons continué à marcher pour nous réfugier dans les montagnes. Mes pieds étaient en sang. Après avoir marché toute une nuit, notre famille est arrivée terrorisée, en sang, en sueur et mourant de soif dans un pays appelé le Liban. »






http://poesie.pourlapalestine.be/category/a-propos-de-mahmoud-darwich/



Une voix est venue de l'oliveraie

L’écho est venu de l’oliveraie.
J’étais crucifié sur le feu
Et je disais aux corbeaux : Ne me dévorez pas.
Je pourrais rentrer à la maison,
Le ciel pourrait pleuvoir,
Et il pourrait…
Éteindre ce bois carnassier!

Un jour je descendrai de ma croix.
Mais alors, comment
Rentrer chez moi, nu nu-pieds?



Etranger dans une ville lointaine

Quand j'étais petit
Et beau,
La rose était ma demeure,
Les sources étaient mes mers.
La rose est devenue blessure
Et les sources sont, désormais, soifs.
- As-tu beaucoup changé ?
- Je n'ai pas beaucoup changé.
Lorsque nous rentrerons comme le vent
À la maison,
Scrute mon front.
Tu y verras les roses, palmiers,
Les sources, sueur,
Et tu me retrouveras, tel que j'étais,
Petit
Et beau...

Si ses images entre passés et présents sont souvent émouvantes,  Mahmoud Darwich cisèle les mots, décrit les images par un vocabulaire humble mais précis, toujours au plus près des êtres et des choses de sa terre ancestrale. Tous les parfums de la vie se retrouvent  au fil de ses poèmes, des parfums d'abricot, d'orange et de jasmin, l'odeur du café le matin, les chevelures des femmes, la mère...
Des mots simples et puissants, derrière la souffrance, l'attente, l'identité...Un recueil puissant que j'ai découvert avec bonheur, intérêt et admiration pour ce grand poète.






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